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Communiqué
Par David Henry

La libération conditionnelle protège nos communautés

Lettre ouverte

Par David Henry, directeur général de l’Association des services de réhabilitation sociale du Québec.

Cette lettre a été publié dans Le Devoir le 11 juillet 2024.


Dans le contexte actuel où les prisons sont pleines et recommencent à déborder, la liberté conditionnelle représente une mesure décisive de protection de nos communautés, travaillant activement à briser les cycles de la délinquance.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la libération conditionnelle agit comme un filet social de sécurité pour la collectivité, car les personnes libérées de détention reçoivent un encadrement et un accompagnement dans leur retour en société, ce qui favorise leur réintégration.

De nombreux organismes spécialisés prennent en charge l’hébergement, la recherche d’emploi, le retour aux études, la désintoxication et les divers suivis psychosociaux pour ces personnes qui, souvent, proviennent de milieux défavorisés. Ces ex-détenus font face à de nombreux défis et ont des besoins importants qui, dans le cadre d’une libération conditionnelle, peuvent être pris en charge. Cela entraîne invariablement un retour dans la société plus réussi et leur permet de repartir sur des bases plus solides qui n’ont pas toujours été là.

La libération conditionnelle est méritoire et permet à une personne condamnée de purger les deux tiers de sa peine dans la communauté, avec des critères stricts de remise en liberté et de surveillance. Plusieurs études indiquent que le taux de récidive de ces personnes est beaucoup moins important que pour ceux qui sont relâchés plus tard. Notons également qu’une personne qui ne respecte pas ses conditions de remise en liberté ou qui ne s’implique pas dans son processus de réintégration sociale retournera très probablement en détention.

La libération conditionnelle constitue donc une occasion précieuse de contenir la criminalité au Québec, d’autant plus dans un contexte de hausse de la violence et du sentiment d’insécurité auprès de la population, comme le rapportent l’Institut de la statistique du Québec et les médias.

Il est pratiquement certain que si, au sortir de la prison, les personnes sont laissées à elles-mêmes, dans les mêmes conditions de vie et avec les mêmes problématiques personnelles (par exemple, dépendance, impulsivité, distorsions cognitives, minces habiletés parentales, etc.), le risque de récidive demeurera inchangé, voire augmentera. La réponse à la délinquance est complexe et passe par une multitude d’interventions qui agiront tant sur des caractéristiques individuelles que sur des déterminants sociaux (éducation, pauvreté, employabilité, appartenance à la communauté, etc.).

Une solution à long terme

L’efficacité, la rapidité et la valorisation des services d’accompagnement sont donc déterminantes. Les personnes qui sortent d’un établissement de détention se trouvent au centre de leur processus de réintégration, doivent fixer des objectifs personnels et les nouvelles conditions sur lesquels elles voudront travailler avec les organismes spécialisés. Ce faisant, elles se créent une réelle chance de réintégration sociale, ce qui diminue leur risque de récidive et augmente la sécurité de nos communautés.

C’est ainsi que l’apport des organismes spécialisés à la société prend tout son sens, bien qu’il soit encore méconnu. Pourtant, ces derniers pourraient être mieux soutenus pour déployer leurs services, tout comme bien des organismes du secteur communautaire.

L’incarcération n’est qu’un arrêt d’agir temporaire et, malheureusement, toutes les études en criminologie montrent que la prison ne dissuade pas une personne de commettre un délit. Le phénomène bien documenté des « portes tournantes » pour de courtes peines, soit ces personnes qui font de fréquents allers-retours en détention, prouve que quelques mois de prison additionnels ne changent rien à leur niveau de dangerosité, contrairement à des mesures de libération conditionnelle, qui offrent un encadrement nécessaire.

La libération conditionnelle, par l’intervention, l’encadrement et l’accompagnement dans la communauté des personnes contrevenantes, demeure vraiment le seul moyen de protéger nos communautés à long terme.