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Communiqué
Par Lettre ouverte - Semaine nationale de la réhabilitation sociale 2024

Soutenir les proches des personnes contrevenantes comme geste d’une société solidaire

Lettre ouverte

Par David Henry, directeur général, criminologue, Association des services de réhabilitation sociale du Québec

Daniel Benson, porte-parole, Semaine nationale de la réhabilitation sociale 2024

Et plus de 40 directions générales d’organismes en réhabilitation sociale du Québec


Cette lettre a été publié dans La Presse le 14 octobre 2024 et dans Le Journal de Montréal le 15 octobre 2024.


La prison agit bien au-delà de ses murs, car l’expérience carcérale s’élargit inexorablement aux familles et aux proches des personnes incarcérées. Il s’agit de parents dont les enfants sont en prison, de conjoint·e·s, d’enfants qui visitent leurs parents en détention ou encore d’ami·e·s et de proches qui sont affecté·e·s par cette incarcération. Ces impacts invisibles sont à la base du thème de la Semaine nationale de la réhabilitation sociale 2024, qui débute aujourd’hui.

Par une mobilisation qui a lieu partout au Québec, les organismes communautaires œuvrant en réintégration sociale nous invitent à considérer le chemin difficile et effacé de tous ces proches de personnes détenues et ex-détenues qui sont les mal-aimées du système : des personnes qui n’ont pas fait le choix d’une existence de compromis et qui reçoivent très peu, voire aucun soutien de la part de programmes existants. À ce jour, seulement deux organismes d’aide offrant de l’écoute et des services spécialisés aux proches des personnes incarcérées existent au Québec, alors que les programmes visant les personnes contrevenantes ou victimes de crimes sont multiples.

L’entourage purge une peine sociale à part entière et vit le poids de l’invisibilité dans l’espace social. À qui parler de notre père emprisonné ou de notre tante incarcérée ? Et ce, sans être jugé·e·s pour un crime que nous n’avons pas commis ? Ces personnes se retrouvent seules, isolées d’une partie de leur entourage et même de leurs communautés en vivant un sentiment de honte injustifié. Parfois, les familles font des heures de route, certains doivent même prendre un jour de congé, pour visiter un proche en détention, et il arrive qu’ils doivent faire demi-tour à cause du manque de personnel pour procéder à l’ouverture du parloir. Il arrive aussi que des familles restent pendant des semaines sans nouvelles de leur proche incarcéré·e. Cependant, le maintien des contacts est d’une importance majeure pour la réhabilitation sociale des personnes incarcérées.

De plus, l’incarcération d’un parent peut avoir de lourdes conséquences sur la vie d’un enfant et est susceptible de le mettre en situation de risque s’il n’est pas correctement accompagné. Sans que cela suffise à définir son existence, comme conséquence de l’incarcération parentale, l’enfant peut vivre de la discrimination, de la stigmatisation, de l’exclusion sociale, de l’instabilité dans ses liens familiaux, de la violence et du harcèlement.

Aborder l’incarcération du point de vue des proches des personnes incarcérées offre un autre regard sur l’institution carcérale, mais aussi sur l’absence de programmes et de services pour cette partie oubliée de la population. Ces personnes sont rarement reconnues comme des victimes au sens de la loi, notamment à cause de la criminalité de leurs proches.

Malgré le défi que cela peut représenter, il est important que la communauté passe pardessus ses préjugés, car la réintégration sociale a lieu aussi dans le regard que l’on porte sur les personnes contrevenantes et sur leur famille. En tant qu’employeurs, collègues, propriétaires d’un logement ou voisin·e·s, nous pouvons toutes et tous faire une différence dans le cheminement de ces personnes en suspendant le jugement et en incarnant les valeurs d’une société véritablement solidaire.

Chaque année, la Semaine de la réhabilitation sociale est une invitation, reconnue par l’Assemblée nationale et plusieurs acteurs de notre société, à réfléchir à la destinée de milliers de personnes qui ont des démêlés avec la justice, et à leur capacité de se refaire une vie. C’est également l’occasion de souligner le travail important de nombreux organismes communautaires impliqués dans la saine réintégration des personnes judiciarisées, au bénéfice de notre sécurité publique. Car la réintégration est la meilleure façon à long terme de réduire les risques de récidives des personnes contrevenantes et, ce faisant, de protéger nos communautés.

La solidarité de la communauté et la réintégration sociale permettent de donner une seconde chance aux individus marginalisés et un précieux soutien à leurs proches.


Liste des signataires :

1. Aleksandra Zajko, directrice générale, Société Élizabeth-Fry du Québec

2. Bruno Paré, directeur général, OPEX Sherbrooke

3. Chantal Lessard, directrice générale, CRC ATNQ

4. Daniel Poulin-Gallant, directeur général, Alter Justice

5. Julie Delle Donne, directrice générale, CRC Essor

6. Jean-François Cusson, directeur général, CRC Carpe Diem

7. Geneviève Latreille, directrice générale, CRC Le Joins-Toi

8. Paul Robitaille, directeur général, Maison l’Intervalle

9. Isabel Gervais, conseillère principale prévention de l’exclusion, YMCA du Québec

10. Steeve Thomassin, directeur général, Maison Painchaud

11. Martin Bélanger, directeur général, Le Répit du Passant

12. Stéphanie Tremblay, directrice générale, CRC Joliette

13. Céline Bouquin, directrice générale, Continuité-Famille auprès des détenues

14. Érika Morin, directrice générale, Centre d’action bénévole du Lac

15. Diane Tremblay. directrice générale, CRC La Pavillon

16. Richard Gagnon, directeur général, Agence sociale spécialisé de l’Outaouais

17. Marie-Claude Coudé, directrice générale, Pavillon L’Essence Ciel

18. Véronique Lejour, directrice générale, Centre l’Entre-Toit

19. Estelle Drouvin, directrice, Centre de services de justice réparatrice

20. Annie Charest, directrice générale, centre de traitement L’Arrimage

21. Catherine Pouliot, directrice générale, CIVAS Montérégie

22. Danie St-Yves, directrice générale, Maison Radisson

23. Lorraine Michaud, directrice générale, CRC Arc-En-Soi

24. Jean-Claude Bernheim, président, Société John Howard du Québec

25. Judith Deslauriers, directrice générale, Transition Centre-Sud

26. Catherine Perreault, directrice générale, Auberge Sous Mon Toit

27. Carl Veilleux, directeur général, Société Emmanuel-Grégoire

28. Benoit Robineau, directeur général, Service d’intégration au marché du travail de la Montérégie

29. André Bonneau, directeur général, CRC Roberval

30. Louise Ayotte, directrice générale, Centre d’intervention en dépendances Adrienne-Roy

31. Annie Morel, directrice générale, Service d’aide en prévention de la criminalité

32. France Bouffard, directrice générale, Maison Eureka

33. Sophie Maury, directrice générale, Relais Famille

34. Claudine Bertrand, directrice générale, Via Travail

35. André Simard, directeur général, Equitem

36. Karine Roby, directrice générale par interim, Maison de transition de Montréal

37. Luc Gagnon, directeur général, Corporation maison Charlemagne

38. Laurent Champagne, directeur général, Aumônerie communautaire de Montréal

39. Raymond Cotonnec, directeur général et administrateur, CRC Curé-Labelle Inc

40. Mylène Castonguay, directrice générale, L'Orienthèque

41. Candy Desrosiers, directrice générale, Aux Trois Mâts

42. Patrick Pilon, directeur général, Réhabex