Porte Ouverte Magazine

La semaine de la réhabilitation sociale

By Maude Lafleur,
Agente aux communications et aux programmes, ASRSQ

and Rencontre avec Jean-Philippe Bérubé,
Coordonnateur clinique, Transitition Centre-Sud

LA RÉHABILITATION SOCIALE, ÇA FONCTIONNE !

La Semaine de la réhabilitation sociale est officiellement inaugurée, pour souligner l’événement nous avons décidé de reprendre la rubrique, La réhabilitation sociale, ça fonctionne ! À chaque parution, nous irons rencontrer des personnes du réseau de l'ASRSQ. À travers des témoignages, cette rubrique permettra de faire connaître au public des exemples de réussite de réhabilitation sociale de personnes judiciarisées. Nous rencontrons cette-fois, Jean-Philippe Bérubé, coordonnateur clinique qui travaille depuis 7 ans à l’organisme Transition Centre-Sud à Montréal.

D’entrée de jeu, Jean-Philippe nous fais comprendre que le succès est quelque chose de relatif : « Nous avons tous notre opinion sur ce qui devrait être une histoire de succès et ce qui ne l’est pas. »

En effet, au fil de la discussion, il évoque l’histoire de cet ancien résident de la maison de transition. Consommation, traffic etc., il correspondait au profil typique d’un délinquant.

Après plusieurs tentatives infructueuses de réinsertion sociale, cet homme décida un jour de demander de l’aide. C’est ainsi qu’il entama des démarches médicales et qu’il reçut le diagnostic de TDAH sévère.  Son comportement délinquant était en fait, un moyen de pallier à son problème psychologique. En effet, sans consommation, il était impossible pour lui de mettre de l’ordre dans ses affaires et d’organiser ses idées. Son séjour en maison de transition lui permit donc d’avoir recours à l’aide et au soutien nécessaire à sa réinsertion sociale.

 

Avec la prise de médication, il était maintenant capable d’occuper un emploi et de démarrer une entreprise en construction.

Jean-Philippe soutient que cet exemple illustre bien que le succès est quelque chose de relatif : Il faut se mettre dans les souliers de la personne pour mesurer si c’est un succès ou pas. Il faut voir d’où vient cette personne, comment elle est arrivée en maison de transition et comment elle en sort. » En effet, le séjour d’une personne en maison de transition est un court laps de temps dans la vie de personnes qui ont 40 ou 50 ans. « On est là pour semer une graine, On aurait pu choisir une histoire un peu plus flashy, mais mon équipe et moi avons choisi celle-là, car même un petit changement peut-être une success story. »

 

Travail d’équipe

 

Derrière toute histoire de succès, tout un travail d’équipe est effectué. Les intervenants, les conseillers, le personnel en maison transition qui œuvrent quotidiennement et tout le réseau d’un résident participent à sa réussite. « Pour moi une des clés de la réussite de réhabilitation d’une personne judiciarisée, c’est bien le travail d’équipe.  Ce n’est pas seulement le travail du conseiller ou de la conseillère qui s’occupe de son dossier. », soutient Jean-Phillippe. Par ailleurs, il faut que la personne judiciarisée puisse avoir un espace sécuritaire pour favoriser sa réhabilitation et cela passe notamment par les besoins de base (logement et nourriture) qu’offrent les maisons de transitions. 

 

 Se sentir humain à nouveau

La maison L’issue de Transition centre-sud offre divers programmes à ses usagers dont un spécialisé en violence conjugale. Ce programme comprend des ateliers  préthérapeutique de sensibilisation pour les préparer à leur thérapie de violence conjugale. Divisés en groupe de 7 à 9 personnes, les usagers sont accompagnés d’un animateur avec qui ils travaillent sur eux-mêmes, entre autres en partageant leurs expériences et leurs vécus. Jean-Philippe y fait la rencontre d’un participant aux ateliers.  À sa sortie de prison, il ne lui restait plus rien ni personne, car du jour au lendemain, il avait tout perdu : sa femme, ses enfants et son emploi. C’est dans ce contexte-là que la maison de transition lui servit de tampon. En effet, ces ateliers se sont avérés être un tournant dans la vie de ce résident. L’accueil, le respect et le soutien qu’il reçoit à son arrivée en hébergement lui redonnent le sentiment de se sentir humain depuis son arrestation.  Son passage en maison de transition lui offre l’occasion de se pardonner. Alors qu’il avait des idées suicidaires et était dépressif, au fil des mois, il finit par se redonner une chance et tourner la page pour avancer.

 

 Comment sensibiliser les citoyens

 

Malgré plusieurs exemples de réhabilitations réussies, Jean-Philippe soutient que ce n’est pas la cause la plus populaire auprès des citoyens. En effet, on a davantage tendance à soutenir les causes qui touchent les personnes âgées, les personnes handicapées, les enfants malades, la pauvreté, etc. Mais pourtant la réhabilitation sociale des personnes judiciarisées est le meilleur moyen de protéger les communautés à long terme.  Pour conscientiser la population, il propose de créer des rencontres entre personnes contrevenantes et un citoyen pour que chacun puisse réaliser qu’ils ont beaucoup à apprendre et qu’ils ne sont pas très différents l’un de l’autre. La personne judiciarisée a peut-être commis un délit, mais au-delà cela, c’est peut-être aussi un père, un travailleur, un artiste et c’est avant tout et surtout une personne.