Renseignements utiles

(Ré)intégration sociale et communautaire

Qu'est-ce que la (ré)intégration sociale et communautaire ?

La réintégration sociocommunautaire se définit comme un processus d’adaptation individualisé, multidimensionnel et à long terme qui n’est achevé que lorsque la personne réintégrée participe à l’ensemble de la vie de la société et de la communauté où elle évolue et qu’elle a développé un sentiment d’appartenance à leur égard [1].

Il s’agit donc d’un processus d’adaptation à un milieu donné qui est propre à chaque personne. Ce processus comporte trois dimensions :

1. La dimension organisationnelle (hébergement, nourriture, vêtements, etc.),

2. La dimension occupationnelle (formation, travail, bénévolat, etc.)

3. La dimension relationnelle (famille, pairs, implication dans la communauté, etc.).

Il importe aussi d’être conscient qu’il peut prendre un certain temps avant de s’accomplir.

De plus, elle est le socle qui permet d’amorcer le processus de réhabilitation sociale des personnes contrevenantes qui s’intègrent ou qui sont en voie de se réintégrer dans la société et la communauté en tant que personnes dignes, libres et responsables qui vivent en paix avec elles-mêmes et leurs environnements sociaux et communautaires.

Enfin, procéder à l’intégration ou la réintégration sociocommunautaire d’une personne, c’est la mettre en relation non seulement avec les différents circuits sociaux propres à une société donnée, mais aussi avec les différents types de liens qui peuvent s’établir au sein de la communauté humaine.

[1]https://asrsq.ca/assets/files/...

Pour mieux comprendre

  • (Ré)intégrer :

L’ASRSQ utilise désormais les concepts d’intégration ou de réintégration sociocommunautaire plutôt que celui de réinsertion sociale. Cela permet d’abord de reconnaître que certaines personnes contrevenantes auront à se réintégrer socialement après leur passage dans le système de justice, mais aussi que d’autres auront à effectuer une véritable démarche d’intégration sociale parce qu’elles n’avaient jamais été intégrées auparavant. De plus, le terme d’intégration a une portée plus grande que celui d’insertion. L’insertion ne vise qu’à introduire une personne dans un milieu social donné, alors que l’intégration va plus loin en cherchant aussi à créer une plus grande interdépendance entre celle-ci et les autres membres d’une collectivité.

  • Réhabiliter :

Selon le Petit Robert : « Rétablir dans un état, dans des droits, des privilèges perdus » ou « Rétablir dans l’estime, dans la considération d’autrui ».

Pour l’ASRSQ, réhabiliter pleinement une personne contrevenante, c’est agir à la fois sur les dimensions sociales, communautaires et personnelles de sa condition humaine

  • Dimensions sociales:

Dans Introduction à la sociologie générale (1969), Guy Rocher note que, dans la société, « les relations entre les personnes s’établissent sur la base des intérêts individuels; ce sont des rapports de compétition, de concurrence ou à tout le moins des relations sociales marquées au coin de l’indifférence pour tout ce qui concerne les autres. » La relation « sociale » est donc une relation « froide ». Elle recouvre par exemple le monde des affaires, l’État, le droit, la science et l’opinion publique.

  • Dimensions communautaires :

Dans Introduction à la sociologie générale (1969), Guy Rocher note que la communauté est formée « de personnes qu’unissent des liens naturels ou spontanés, ainsi que des objectifs communs qui transcendent les intérêts particuliers de chacun des individus. » Ainsi, la relation « communautaire » est une relation « chaude » qui recouvre les liens entre parents, voisins, compagnons de travail, personnes issues de la même ethnie, adhérents à un même parti politique, etc. En fait, cette relation recoupe tout ce qui a trait à ce que des gens peuvent avoir en commun : « communauté de sang », « communauté de lieu », « communauté d’intérêts », « communauté d’identité » ou « communauté d’esprit »

  • Le point de vue de la loi

    La Loi sur le système correctionnel du Québec (LSCQ) a « comme objectif d'apporter une vision commune à tous les intervenants participant à la réinsertion sociale des personnes contrevenantes » selon la Sécurité publique du Québec.

    Dès la première phrase de l'article 1 de la LSCQ, on peut lire que « Les Services correctionnels du ministère de la Sécurité publique, la Commission québécoise des libérations conditionnelles ainsi que leurs partenaires des organismes communautaires et tous les intervenants de la société intéressés au système correctionnel favorisent la réinsertion sociale des personnes contrevenantes ».

    Le chapitre I définissant les principes généraux de la LSCQ ajoute deux autres missions : la protection de la société et le respect des décisions des tribunaux.

    De plus, il est inscrit dans l’article 3 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition que le but du système correctionnel est de « contribuer au maintien d’une société juste, vivant en paix et en sécurité, d’une part, en assurant l’exécution des peines par des mesures de garde et de surveillance sécuritaires et humaines, et d’autre part, en aidant au moyen de programmes appropriés dans les pénitenciers ou dans la collectivité, à la réadaptation des délinquants et à leur réinsertion sociale à titre de citoyens respectueux des lois »[1]

    Enfin, le Code criminel a vu le jour en 1892, il contient les crimes pouvant faire l'objet d'une poursuite criminelle au Canada. Le Code criminel détermine l'objectif de la peine selon l'article 718 : « Le prononcé des peines a pour objectif essentiel de contribuer, parallèlement à d'autres initiatives de prévention du crime, au respect de la loi et au maintien d'une société juste, paisible et sûre par l'infliction de sanctions justes visant un ou plusieurs des objectifs suivants :

    • Dénoncer le comportement illégal;
    • Dissuader les délinquants, et quiconque, de commettre des infractions;
    • Isoler, au besoin, les délinquants du reste de la société;
    • Favoriser la réinsertion sociale des délinquants;
    • Assurer la réparation des torts causés aux victimes ou à la collectivité;
    • Susciter la conscience de leurs responsabilités chez les délinquants, notamment par la reconnaissance du tort qu'ils ont causé aux victimes et à la collectivité ».

    Favoriser la réinsertion sociale d'un contrevenant est donc un des objectifs de la peine selon le Code criminel.

    [1] https://laws-lois.justice.gc.c...

  • Les voies de la réintégration

    • L’emploi

    L'accès à l'emploi est un élément majeur du processus de réintégration. Il sous-entend une volonté de la part de l'individu et de la communauté d'aller vers la réhabilitation.

    L'occupation d'un emploi :

    • Implique un important investissement de temps au quotidien;
    • Développe une estime de soi positive;
    • Permet de consolider un réseau social;
    • Représente une source de revenus essentielle à la vie en société;
    • Contribue au bon développement de cette société.

    On constate aisément que l'occupation d'un emploi contribue à satisfaire les besoins de l'individu représenté par la pyramide de Maslow. Le psychologue Abraham Maslow a établi dans les années 1940 une classification hiérarchique des besoins humains. Selon lui, ces besoins créent la motivation. Une fois les besoins de base satisfaits, l'individu développe les besoins dits secondaires. Pourtant l'accès à l'emploi des personnes judiciarisées est compromis par un manque de formation et une forte discrimination de la part des employeurs.

    Pour faciliter la réintégration, plusieurs programmes ont été mis en place par le Service correctionnel du Canada (SCC). Ces programmes proposent des activités socioculturelles, de loisirs, sportives, du travail (rémunéré ou non) ou des formations. Il existe également des programmes destinés aux familles des personnes judiciarisées, aux personnes victimes et d'autres qui tentent de répondre à besoins particuliers (toxicomanie, intervention auprès des femmes judiciarisées, des Autochtones, etc.). CORCAN est un programme qui fournit des possibilités d'emploi et de formation aux personnes détenues dans les pénitenciers fédéraux et dans une moindre mesure, pour une courte durée, à leur sortie de prison. Cette initiative augmente les chances d'employabilité et permet de recréer des situations de la vie dans un milieu de travail réel. Plusieurs organismes communautaires spécialisés dans l’employabilité des personnes judiciarisées offrent également leurs services dans la communauté[1].

    La réintégration ne s'arrête pas à la remise en liberté de l'individu, le sentiment d'appartenance à une communauté doit aussi avoir le temps de se mettre en place. Il existe des organismes et des programmes qui facilitent le changement de milieu de vie.

    • La libération conditionnelle

    La Commission des libérations conditionnelles du Canada (CLCC) démontre que la libération conditionnelle est efficiente :

    • Au cours des dix derniers exercices (de 2008-2009 à 2017-2018), le nombre de condamnations pour infraction avec violence a diminué de 57 % parmi les délinquants sous responsabilité fédérale en liberté sous condition (passant de 192 en 2008-2009 à 83 en 2017-2018). Le nombre annuel moyen de condamnations pour infraction avec violence se chiffrait à 10 parmi les délinquants en semi-liberté et à 11 parmi les délinquants en liberté conditionnelle totale, comparativement à 116 parmi les délinquants en liberté d'office.
    • Au cours des dix derniers exercices (de 2008-2009 à 2017-2018), les condamnations pour infraction avec violence parmi les délinquants en liberté d'office représentaient 85 % de toutes les condamnations prononcées contre des délinquants sous responsabilité fédérale en liberté sous condition.
    • Si l'on compare les taux de condamnation pour infraction avec violence par tranche de 1 000 délinquants sous surveillance entre 2008-2009 et 2017-2018, on constate que les délinquants en liberté d'office étaient 11,6 fois plus susceptibles de commettre une infraction accompagnée de violence durant leur période de surveillance que les délinquants en liberté conditionnelle totale, et 4,7 fois plus susceptibles de commettre une infraction accompagnée de violence que les délinquants en semi-liberté.

    En 2018-2019[2], selon la CLCC, le taux d'octroi de la libération conditionnelle en semi-liberté de ressort fédéral était de 79,5 % et celui de la libération conditionnelle totale de ressort fédéral de 38,2 %. Pendant la même période, le taux d'achèvement des libertés sous condition de ressort fédéral pour la semi-liberté était de 91,4 %, pour la liberté conditionnelle totale de 87,8 % et pour la liberté d'office de 65,7 %.

    • Le soutien communautaire

    Les maisons de transition sont des organismes servant de pied-à-terre dans une collectivité à des individus judiciarisés en démarche d'intégration ou de réintégration sociale et s'inscrivant dans un processus de libération graduelle. Elles permettent aux individus de combler leurs besoins de base (hébergement, nourriture, etc.); ils peuvent alors poursuivre leurs démarches de réintégration sociale, notamment la recherche d'emploi et le développement personnel. Ces maisons offrent des programmes qui varient d’un organisme à l'autre : toxicomanie, délinquance sexuelle, gestion de la colère, etc. Les Cercles de soutien et de responsabilité (CSR) sont constitués de quatre à sept bénévoles qui s'engagent à soutenir un délinquant sexuel qui réintègre la société après une peine d'emprisonnement. Selon le SCC, la mission d'un CSR est de « réduire considérablement le risque que de victimisation sexuelle des membres de la collectivité, en aidant les délinquants à se réinsérer dans la collectivité, à mener une vie responsable et productive ».

    [1] http://www.cccja.org/

    [2] https://www.securitepublique.g...

  • Taux de récidive

    Le taux de récidive est défini comme étant « le pourcentage de délinquants mis en liberté qui réintègrent un établissement correctionnel fédéral pendant une certaine période » selon le SCC. Donner un taux de récidive général est extrêmement difficile, de nombreuses questions se posent : faut-il faire une moyenne des différents taux? Faut-il compter toutes les récidives de la même façon? Quelle doit être la période de référence?

    Deux exemples sont donnés dans le volume 5 du FORUM (recherche sur l'actualité correctionnelle) du SCC consacré à la récidive « Par exemple, un délinquant coupable de fraude mis en liberté à condition de ne pas consommer d'alcool ou de drogue décide de fêter sa liberté retrouvée en se saoulant avec ses amis. Les voisins incommodés par la fête appellent la police et celle-ci découvre par hasard que le délinquant est en liberté conditionnelle. Y a-t-il récidive ?

    En admettant qu'on s'en tienne aux manquements les plus graves, prenons l'exemple d'un délinquant sexuel mis en liberté à condition de ne pas fréquenter d'écoles, son terrain de chasse de prédilection. Si les autorités apprennent que le délinquant sexuel traîne dans les cours des écoles, est-il en récidive ? C'est grave, mais y a-t-il récidive ?

    Les programmes de réintégration sociale ainsi que les moyens mis en œuvre pour aider à la réadaptation des personnes judiciarisées comme les libérations conditionnelles ont aussi une influence sur la récidive. Selon un rapport de recherche soumis au Centre Interuniversitaire de Recherche en Analyse des Organisations (CIRANO) par le Ministère de la Sécurité publique en 2019, les mesures favorisant la réinsertion sociale des personnes ayant reçu une sentence inférieure à deux ans dans les établissements provinciaux du Québec sont efficaces car elles diminuent considérablement le la récidive. En effet, il est constaté que les personnes judiciarisées qui participants à ces mesures ont des taux de récidive nettement inférieurs que les non-participants. Dépendamment de l’établissement, le taux de récidive des non-participants se situe entre 35% et un peu plus que 50%, alors que pour les participants aux programmes ce taux se situe entre 6% et un peu plus que 10%. Il est aussi constaté que la probabilité de récidive tend à diminuer selon le nombre de programmes auxquelles la personne judiciarisée s’implique au cours d’une même sentence[1].

    À cela on peut ajouter qu'en 2018-2019[2] :

    • 0,9 % des semi-libertés de ressort fédéral ont pris fin suite à la perpétration d'une infraction sans violence et 0,1 % suite à une récidive accompagnée de violence.
    • 2 % des libertés conditionnelles totales de ressort fédéral ont pris fin suite à la perpétration d'une infraction sans violence et 0,4 % suite à une récidive accompagnée de violence.
    • 7,4 % des libérations d'office ont pris fin en raison d'une infraction sans violence et 1,1 %, en raison d'une infraction avec violence.

    Depuis la mise en œuvre du processus de pardon/de suspension du casier en 1970, 535 615 pardons/suspensions du casier ont été octroyés/délivrés et ordonnés. De ce nombre, environ 95% demeurent en vigueur, ce qui montre que la grande majorité des personnes qui ont obtenu un pardon ou une suspension du casier continuent d'être des citoyens respectueux des lois dans la collectivité.

    L'ASRSQ demeure convaincue que la réintégration sociale et communautaire est le meilleur moyen de protéger la communauté à long terme.

    [1] https://www.cirano.qc.ca/files...

    [2] https://www.securitepublique.g...