Revue Porte Ouverte

Les Autochtones et le système de justice pénale

Par Ginette Tremblay

Innu Meshkenu : un projet porteur d'espoir

Marcher pour semer l'espoir, c'est le défi que s'est donné le Dr. Stanley Vollant, premier chirurgien autochtone du Québec, dans le cadre de son projet Innu Meshkenu. L'idée du projet lui vient durant son périple à Compostelle en 2008. Un rêve... une vision de lui-même marchant un «Compostelle» québécois d'une communauté à une autre, partageant avec les jeunes, discutant avec les aînés. Une marche de par les routes et les chemins forestiers qui sillonnent le Québec, mais aussi de par les sentiers empruntés jadis par les ancêtres. Pourquoi un projet d'aussi grande envergure? Le but ultime est d'insuffler l'espoir d'un futur meilleur à la génération autochtone montante.

Innu Meshkenu, le chemin de l'Innu, le chemin de tous les hommes, résume pour ainsi dire le parcours du Dr. Vollant lui-même. Ayant grandi dans la communauté de Pessamit sur la Côte-Nord, il a la chance d'apprendre de son grand-père les traditions innues et de constater l'importance de celles-ci sur les valeurs de la communauté. Plus tard, imprégné de ce savoir ancestral, le Dr. Vollant entreprend des études secondaires dans la région de Québec. Il poursuivra son cheminement académique à l'Université de Montréal où il deviendra chirurgien. Après avoir occupé plusieurs postes, tels que médecin-spécialiste à l'Hôpital de Baie-Comeau, au CSSS de Chicoutimi et à l'Hôpital Montfort d'Ottawa, il occupe le poste de coordinateur du volet autochtone de la faculté de médecine de l'Université d'Ottawa et par la suite, de l'Université de Montréal. Le Dr. Vollant conserve néanmoins des liens serrés avec sa région natale et les siens puisqu'il pratique également la médecine à la clinique médicale de Pessamit.

La carrière du Dr. Vollant n'empêche en aucun cas son engagement dans de multiples projets. Bien au contraire, il contribue activement à différentes associations professionnelles et donne également du temps à certains projets qu'il a lui-même mis sur pied dont les Camps Carrières-Santé et les mini-écoles de médecine, tous destinés à sensibiliser les jeunes Autochtones aux opportunités d'emploi dans le domaine de la santé. C'est donc dans cet esprit d'engagement et d'une volonté de redonner aux siens qu'il s'investit pleinement dans le projet Innu-Meshkenu.

On peut constater une baisse significative de la consommation de tabac, d'alcool, de drogues et une perte de poids chez les participants à la marche.

Innu Meshkenu se révèle donc comme un véritable pèlerinage de 5000 kilomètres répartis en une quinzaine d'étapes de marche étalées sur cinq ans. Des arrêts sont prévus dans les communautés visitées. Trois objectifs principaux sont visés par Dr Vollant :

Inspirer les jeunes en mettant en évidence

  • L'importance d'avoir confiance en leurs propres moyens, en leur potentiel humain pour la réalisation de leurs rêves et de ceux de leurs communautés
  • La valeur dans le monde moderne de leurs origines, du lien avec leur territoire et de leur identité culturelle
  • La nécessité de l'acquisition de saines habitudes de vie pour le maintien d'une bonne santé physique et mentale, spirituelle et émotionnelle
  • L'importance des études pour un avenir de qualité

Faire valoir l'importance des aînés et les rencontrer afin

  • D'acquérir des connaissances ancestrales dont la médecine traditionnelle.
  • De contribuer à la pérennité et à la valorisation de ce savoir.
  • D'assurer la reconnaissance et l'intégration de celui-ci dans le monde moderne.
  • De transmettre à la communauté scientifique la valeur de ce savoir face aux défis associés à la santé des Premières Nations et à celle de l'humanité.

Favoriser une meilleure compréhension mutuelle des cultures autochtones et allochtones dans le dessein

  • De faciliter et de dynamiser les échanges interculturels.
  • De faire connaître la valeur du pluralisme culturel au bénéfice du patrimoine humain.
  • De permettre l'établissement de liens durables entre les différentes cultures.

«Je marche mon discours!» dit résolument Stanley Vollant et ce faisant, il démontre aux jeunes que c'est par la persévérance et le courage que l'on réalise ses rêves. D'ailleurs les retombées du projet, entrepris en 2010, sont déjà apparentes. Mis à part l'intérêt médiatique toujours grandissant pour la cause, plusieurs signes indiquent que les objectifs du projet sont en bonne partie atteints dans les communautés visitées. On peut constater une baisse significative de la consommation de tabac, d'alcool, de drogues et une perte de poids chez les participants à la marche. On peut voir la création de clubs de marche et la mise sur pied de projets d'expéditions de raquettes et de canot afin de garder vivant, au sein des communautés visitées, le passage du Dr. Vollant et d'Innu Meshkenu. Enfin, la valorisation de l'identité autochtone, du sentiment d'appartenance et du renforcement des liens entre communautés visitées sont ravivés.

Stanley Vollant croit fermement que le fait de poursuivre ces rêves et de les réaliser, aura une influence positive sur l'estime de soi des jeunes, et donc un impact certain sur des phénomènes tels que le décrochage scolaire, l'incarcération ou le suicide chez les jeunes Autochtones. Pour lui, le projet Innu Meshkenu devient, par le fait même, un outil de prévention. «Croyez en vous et en vos rêves! Poursuivez ces rêves et ne vous laissez pas décourager par qui que ce soit! Il faut poursuivre ses rêves et les réaliser! », répète-t-il à tous les jeunes qu'il rencontre dans les écoles visitées. Et il en sait quelque chose : le chirurgien innu ne parlait pas français ni anglais à l'adolescence et la vue du sang le terrifiait…

Par son projet Innu Meshkenu, le Dr. Vollant pave la voie à suivre vers l'espoir de meilleurs lendemains. Il insiste pour dire que s'il change la vie d'un seul jeune, il aura réussi son pari. Gageons que c'est déjà chose faite.

Pour plus d'information, visitez le site internet : www.innu-meshkenu.com