Porte Ouverte Magazine

Loi sur le système correctionnel du Québec

By ASRSQ

Philosophie d’intervention en matière de réinsertion sociale aux services correctionnels du Québec

Préambule

Adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale du Québec, la Loi sur le système correctionnel du Québec (LSCQ) permettra aux Services correctionnels du Québec (SCQ), en collaboration avec la communauté, de mettre en place les moyens et les conditions pour effectuer de meilleures évaluations des personnes contrevenantes, de favoriser une meilleure réinsertion sociale et, ultimement, d’assurer une meilleure protection de la société. Plus précisément, la LSCQ vise à :

  • Assurer une meilleure évaluation du risque et des besoins des personnes confiées aux SCQ en s’appuyant sur une collecte de renseignements et sur un système d’échange et de partage de l’information avec leurs partenaires concernés;
  • Instituer un régime plus rigoureux, plus transparent et plus cohérent de la remise en liberté des personnes incarcérées;
  • Assurer un meilleur soutien à la réinsertion sociale des personnes contrevenantes en collaboration avec les ressources de la communauté;
  • Améliorer la crédibilité du système correctionnel.

L’entrée en vigueur de la LSCQ constitue donc une occasion de premier plan pour présenter la philosophie d’intervention en matière de réinsertion sociale aux SCQ. Celle-ci a comme objectif d’apporter une vision commune à tous les intervenants participants à la réinsertion sociale des personnes contrevenantes. Sa publication constitue donc un moyen de partager cette philosophie d’intervention, laquelle réitère les valeurs et les principes des SCQ ainsi que certaines obligations que crée la LSCQ.

Les éléments constitutifs de cette philosophie d’intervention en matière de réinsertion sociale complètent ceux contenus dans le document Philosophie et énoncé de principes des SCQ en matière de sécurité. Ils font notamment état de la nécessité de créer et de maintenir un environnement sécuritaire, afin de permettre au personnel des SCQ et à la clientèle correctionnelle, d’évoluer dans un milieu propice à la prise en charge de leurs responsabilités respectives. Ces deux documents constituent en conséquence les bases de la contribution des SCQ à la protection de la société.

Les assises principales? Les articles 1 et 2 de la Loi sur le système correctionnel du Québec
Trois principes généraux établis par la LSCQ doivent guider les actions de tous les intervenants concernés. Il s’agit de la protection de la société, du respect des décisions des tribunaux et de la réinsertion sociale des personnes contrevenantes. Ces trois principes sont d’ailleurs enchâssés dans les deux premiers articles de la LSCQ :

  1. Les Services correctionnels du ministère de la Sécurité publique, la Commission québécoise des libérations conditionnelles ainsi que leurs partenaires des organismes communautaires et tous les intervenants de la société intéressés au système correctionnel favorisent la réinsertion sociale des personnes contrevenantes. Dans le respect des droits fondamentaux de ces personnes, ils contribuent à la protection de la société en les aidant à devenir des citoyens respectueux des lois tout en exerçant sur elles un contrôle raisonnable, sécuritaire et humain, en reconnaissant leur capacité à évoluer positivement et en tenant compte de leur motivation à s’impliquer dans une démarche de réinsertion sociale.
  2. La protection de la société, assurée par des mesures restrictives de liberté adaptées à la personne, et le respect des décisions des tribunaux sont les critères prépondérants dans la poursuite de la réinsertion sociale des personnes contrevenantes.

Les valeurs qui guident l’intervention correctionnelle

Assurer la prise en charge de personnes contrevenantes représente des tâches souvent complexes et exigeantes. Aussi, exercer une certaine autorité sur les personnes qui leur sont confiées, ou leur fournir du soutien, nécessite que les intervenants s’appuient sur des valeurs spécifiques à l’intervention. De ce fait, la personne contrevenante est en droit de s’attendre à une intervention qui se fait :

  • En fonction de la reconnaissance que toute personne a la capacité d’évoluer positivement;
  • Sur la base de l’engagement à fournir une intervention soutenue par du personnel compétent et intègre avec comme objectif de diminuer les risques de récidive;
  • Dans le respect des droits fondamentaux des personnes qui leur sont confiées en n’imposant que les limitations nécessaires et requises conformément aux lois et règlements en vigueur;
  • En évitant toute forme de discrimination, en faisant preuve de neutralité, d’objectivité et d’honnêteté.

Conséquemment, les SCQ s’assurent que l’intervention auprès des personnes contrevenantes est non seulement libre de tout jugement de valeurs, mais qu’elle est aussi empreinte de respect de l’être humain, de justice, d’équité, de rigueur, d’intégrité et de professionnalisme.

La réinsertion sociale

Réaffirmée avec la LSCQ, la réinsertion sociale se définit comme étant un ensemble d’interventions visant à ce que la personne contrevenante vive de façon socialement acceptable dans le respect des lois. La mise en œuvre de ces interventions se traduit par des activités et des programmes qui visent à soutenir le cheminement de la personne et à mieux la connaître, à consolider une relation de confiance, à mettre à contribution son réseau familial et social et à lui offrir des services adaptés à ses besoins.

La réinsertion sociale, qui demeure la meilleure façon de protéger la société de façon durable, est de plus associée à l’exercice de certaines activités de contrôle qui visent à s’assurer du respect des conditions imposées aux personnes contrevenantes.

Dans toute cette démarche, des responsabilités sont à partager entre :

La personne contrevenante qui est la première responsable de sa prise en charge. Elle a la responsabilité de participer à sa réinsertion et d’utiliser les ressources qui sont mises à sa disposition, bien que, dans certains cas, l’accompagnement ou le soutien de la part des intervenants soit essentiel pour viser sa responsabilisation graduelle. 

– Les intervenants correctionnels :

  • L’agent de probation effectue les évaluations et les plans d’intervention correctionnels (PIC), assume la responsabilité clinique et légale conformément à la loi, contribue également à la réinsertion sociale en effectuant des interventions de responsabilisation et de prise de conscience. De plus, en fonction de l’évaluation du risque et des besoins, il met à contribution l’agent des services correctionnels et les intervenants communautaires;
  • Le conseiller en milieu carcéral agit à titre de personne-ressource face aux problématiques des personnes incarcérées et assure l’élaboration et l’implantation de programmes et de services de soutien à la réinsertion sociale. De plus, il offre du soutien aux agents des services correctionnels et aux gestionnaires de la détention en matière de gestion des sentences et des programmes. Il intervient aussi auprès des personnes incarcérées vivant une situation de crise;
  • L’agent des services correctionnels exerce des activités d’encadrement et d’accompagnement, collabore à l’application du PIC ainsi qu’au processus de préparation à la sortie. Il évalue aussi les personnes contrevenantes condamnées à une peine inférieure à six mois d’incarcération, et assure des activités d’accompagnement et d’encadrement de façon ponctuelle et des activités de contrôle.

Les gestionnaires suscitent l’adhésion du personnel des SCQ à la philosophie d’intervention et la partagent avec les partenaires. Ils supervisent le travail du personnel concerné, s’assurent de la qualité des services et mettent en place les conditions nécessaires au bon déroulement de l’intervention.

Les organismes communautaires offrent des activités ou des services complémentaires à ceux offerts par les SCQ qui sont susceptibles de répondre aux besoins des personnes contrevenantes. Leur contribution peut notamment se traduire par leur participation au suivi des personnes contrevenantes en appliquant le PIC, par l’élaboration et la prestation de programmes de soutien psychosocial et le développement d’habiletés sociales de base, ainsi que par l’hébergement avec des activités d’encadrement et d’accompagnement.

Les ressources de la communauté offrent des programmes et des services spécialisés axés sur le traitement. Ces programmes et services visent à amorcer la résolution des problèmes associés à la délinquance des personnes contrevenantes, notamment les problèmes de violence conjugale, de déviance sexuelle, de pédophilie, d’alcoolisme, de toxicomanie et de santé mentale. Aussi, dans le cadre d’ententes avec un ministère ou un organisme, des services adaptés aux besoins des personnes contrevenantes sont également offerts, notamment en matière de traitement, de formation scolaire et d’emploi.

Par ailleurs, l’apport des fonctionnaires et des ouvriers des SCQ est nécessaire sur le plan des moyens permettant l’actualisation de la philosophie d’intervention.

Les principes relatifs à l’intervention correctionnelle

Les SCQ ont établi des principes en lien avec l’intervention auprès de la personne contrevenante qui interpellent tous les intervenants concernés. Par conséquent, et dans le respect des décisions des tribunaux, l’intervention correctionnelle doit être guidée par les principes qui suivent.

Principe de la connaissance de la clientèle

Ce principe implique que pour mieux évaluer, mieux intervenir et mieux prendre des décisions en vue d’une remise en liberté, il est essentiel de bien connaître la personne contrevenante. En plus de favoriser la création d’un climat de confiance entre la personne et l’intervenant, les SCQ ont l’obligation de prendre, dans les meilleurs délais, toutes les mesures possibles pour se procurer les renseignements concernant les personnes qui leur sont confiées et de les partager, lorsque nécessaire, avec les partenaires pénaux et sociaux tels que la CQLC, les organismes communautaires et les corps policiers.

Principe de l’individualisation 

Ce principe implique :

  • Une évaluation personnalisée qui permet d’élaborer un plan d’intervention correctionnel adapté, réévalué au besoin, afin d’agir sur les facteurs liés à la délinquance de la personne contrevenante; 
  • La détermination d’un niveau d’investissement et d’intervention en fonction des risques et besoins que présente la personne contrevenante;
  • Un ajustement de l’intervention et de l’investissement, lorsque nécessaire.

Principe de continuité

Le principe de continuité de l’intervention signifie que les actions entreprises antérieurement, ou à venir par les intervenants correctionnels, ou les partenaires de la communauté, doivent toujours être prises en compte. L’assurance de cette continuité exige une relation étroite, tant entre l’intervention réalisée en milieu carcéral et l’intervention réalisée en milieu ouvert, qu’entre le milieu correctionnel et le milieu communautaire. Le tout vise à assurer la cohérence dans l’intervention entre tous les intervenants.

Principe de complémentarité

Les SCQ reconnaissent que la contribution des partenaires et des ressources de la communauté, selon leur mission respective, est nécessaire à l’actualisation de la mission des SCQ afin de rendre des services adaptés aux besoins des personnes qui leur sont confiées.
Ce principe ainsi que l’énoncé de Mission sont à la base de la définition de la complémentarité qui consiste à ajouter aux activités fournies par les SCQ des activités offertes par des organismes communautaires et des ressources communautaires en vue d’en arriver à une réponse adaptée aux besoins de la personne contrevenante dans sa démarche de réinsertion sociale.

Conclusion

La mise en œuvre de la LSCQ, l’adhésion à cette philosophie d’intervention par le personnel des SCQ ainsi que son partage avec leurs partenaires, devraient permettre de rendre plus sécuritaire ce risque nécessaire que représente ce défi exigeant, mais réalisable, qu’est la réinsertion sociale des personnes contrevenantes.