Revue Porte Ouverte

Délinquance sexuelle : intervenir auprès des victimes, des proches et des agresseurs

Par Josée Rioux,
Criminologue/travailleuse sociale, présidente de l'ASRSQ et directrice générale du Regroupement des intervenants en matière d'agression sexuelle (RIMAS)

Une belle fierté!

«La persévérance, c'est ce qui rend possible, le possible probable et le probable réalisé». (Robert Half)

Depuis quelques jours, je cogite à mon éditorial en me demandant comment je pourrais faire pour ne pas reprendre les mêmes propos que dans mes autres articles et éditoriaux. Les impératifs fi nanciers ayant peu changé depuis mes derniers propos, je ne voulais surtout pas « radoter » les mêmes choses une autre fois.

C'est ce qui m'a inévitablement amenée à parler de nos réalisations. En janvier dernier, le RIMAS a organisé un colloque dont le thème était « Travailler ensemble… Une question de bon sens! » Plus de 120 personnes ont assisté à cette activité afi n d'améliorer leurs connaissances en matière de services à donner à cette clientèle, disons-le, généralement moins « prisée » par les intervenants. J'ai donc décidé de jeter un regard sur ce réseau spécialisé et d'en faire état.

Nous pouvons être fi ers de notre expertise dans la prise en charge des différentes problématiques sociales. Que ce soit au niveau de la réinsertion sociale des délinquants présentant plusieurs problématiques spécifi ques (santé mentale, toxicomanie et alcoolisme, par exemple), le traitement des agresseurs sexuels ne fait pas exception dans sa complexité.

Après cinq congrès internationaux francophones sur l'agression sexuelle, le Québec fêtera les 10 ans du dépôt de ses « Orientations gouvernementales en matière d'agression sexuelle ». Suite à ces orientations, deux plans d'action quinquennaux ont été adoptés par les différents ministères. Même si le fi nancement n'est pas venu avec ces actions, nous pouvons nous vanter que l'accessibilité à des services spécialisés dans le domaine de l'agression sexuelle est maintenant plus facile pour tous. Une panoplie de centres, programmes et services sont disponibles à peu près dans tout le Québec, mais plusieurs restent encore méconnus.

En effet, ce réseau ne fait pas seulement que proposer des services aux agresseurs, il aide les familles, parents et conjointes de ces agresseurs, favorise la réintégration familiale des pères, aide les hommes victimes d'agression sexuelle, propose des cercles de soutien pour des problématiques plus lourdes, sans compter les évaluations spécialisées pour les tribunaux et j'en passe. Grâce à ces services, c'est toute la société qui bénéfi cie de leurs retombées. La majorité des régions profi te de ces services et les régions moins chanceuses tentent de s'organiser avec beaucoup de conviction, de volonté et surtout de professionnalisme. Je suis convaincue de leur réussite! C'est tout un travail qui est fait par les différents intervenants, qu'ils soient sexologues, criminologues, psychologues, travailleurs sociaux, psycho-éducateurs ou autres; tous ont à coeur la protection de la société par la réinsertion sociale.

Aussi, notre expertise est reconnue dans les différents pays francophones d'Europe. Plusieurs intervenants et chercheurs sont souvent sollicités pour donner des formations ou des conférences et font fréquemment l'objet de références en matière d'évaluation et de traitement. Cette expertise est-elle davantage reconnue ailleurs que dans notre propre province? Il faut parfois se poser la question avec une certaine candeur… Notons aussi que nous sommes la seule province au Canada dotée d'un regroupement – RIMAS – dont le but est de réunir, former, aider et donner des avis à ses membres.

Oui, le Québec est avant-gardiste, novateur et croit fermement en la réinsertion sociale de cette clientèle qui cause beaucoup de peine et de maux autour d'elle.

Je le sais, vous le savez… mais nos décideurs, eux, le savent-ils?